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Conseillé par o n l a l u20 octobre 2019
Une colère bien ordonnée
Don Winslow a écrit « La Frontière » comme on part en mission, animé par un
sens du sacrifice et de l’intérêt supérieur. Parce qu’il vit à San Diego et
qu’il a toutes sortes d’antennes côté mexicain, qu’on lui a raconté des
horreurs et qu’il en a vu les stigmates, il lui fallait boucler le combat,
entamé en 2005 avec « La Griffe du chien », entre l’incorruptible agent Art
Keller (DEA, agence anti-drogue US) et les narcotrafiquants. Il nous l’avait
expliqué fin 2018, quand il était venu à Paris présenter « Corruption », autre
histoire de trafic mais sans lien avec sa saga des « narcos ». « Après «
Cartel » (deuxième volet, sorti fin 2016 NDLR), j’ai pensé ne plus retourner
au Mexique : la guerre de la drogue était terminée, elle avait fait 100.000
morts, le cartel de Sinaloa avait détruit les autres, le niveau de violence
baissait. Et puis l’épidémie de morts de l’héroïne a commencé ( _aux Etats-
Unis NDLR_ ). Joaquin Guzman a été capturé, la « paix du Sinaloa » a été
rompue, et le Mexique a vécu en 2011 son année la plus violente.» Ce choc en
retour, qui l’a pris aux tripes, méritait un récit ample, ambitieux,
définitif, aussi pénible soit le recueil des témoignages et de la
documentation nécessaires pour le bâtir. Le poids de ce pavé de 800 et
quelques pages est à la mesure du ressenti de l’auteur. De sa colère face à
tant de souffrance et de violence semées dans le sillage des cartels et des
dealers.