Le ghetto intérieur

Santiago H. Amigorena

P.O.L.

  • 17 août 2020

    Certaines lectures sont difficiles à commenter, souvent celles lues d'un seul tenant. J'ai retrouvé la même quiétude dans la voix de l'auteur que dans sa narration. Un style posé, des phrases nettes, essentielles.
    Buenos Aires, 1940, Vicente Rosenberg est bien installé avec son épouse Rosita. Il rejoint ses amis au Tortoni, le café de Jorge Luis Borges et des gloires du tango. Ils parlent du shtetl et de l'identité juive. Vicente s'interroge s'il est un jeune juif ou un jeune polonais ou un jeune argentin. Les mots sentencieux sont jetés sur la table comme des oiseaux morts. A Varsovie, une mère va mourir dans le ghetto. Celle de Vicente qui se tait à jamais. Notre temps est né de cette révélation faite à lui-même de ce que chacun porte en lui, en puissance, de possibles abandons, des renoncements et des lâchetés. Chez Santiago H Amigorena, le présent est travaillé par un passé qu'il se doit de mettre au jour. Le texte gère cette tension entre la rémanence du passé et la résistance à le dire. Il éprouve le légitime besoin de dire ce que fut ce silence du grand-père. Il faut organiser la traque du silence pour comprendre, prendre avec soi la conscience du désastre. Ne pas transmettre une expérience c'est la trahir nous apprend la tradition juive. Un grand texte pour se faire le passage de témoin.


  • Conseillé par (Libraire)
    12 février 2020

    Ce roman est bouleversant. C'est un hommage tout en pudeur de l'auteur à son grand-père. Vicente Rosenberg a fui Varsovie pour une vie meilleure à Buenos Aires. Mais il laisse là-bas sa famille et va vivre à distance l'enfermement dans ce qui sera ensuite le ghetto de Varsovie. Ce livre fait partie de ces lectures qui résonnent longtemps, c'est rare et précieux.
    - Anne


  • Conseillé par
    26 octobre 2019

    famille, ghetto

    C’est le premier roman que je lis de cet auteur argentin qui écrit en français. Mais sans le savoir, je le connaissais déjà car il a participé à l’écriture de nombreux films, notamment ceux de Cédric Klapisch.
    Revenons-en à ce roman, dont l’univers est bien loin des films de Klapisch.

    L’auteur raconte une partie de la vie de son grand-père maternel fraîchement arrivé de Pologne en Argentine en 1928. Sa sœur, son frère et sa mère ne l’ont pas suivi. Au fil des lettres de sa mère, Vicente assiste à la construction du ghetto de Varsovie, les conditions de vie difficiles, puis à la destruction de celui-ci.

    De sa mère, il recevra une dernière lettre dont il ne parlera à personne, s’enfermant dans le silence. J’ai eu un peu de mal, au début, avec le rythme du texte, sans cesse entrecoupé de virgule qui venait rompre les phrases. Puis je me suis habitué à sa petite musique, et j’ai parcouru la descente aux enfers de cet homme avec passion.

    Vicente et ses amis juifs s’interrogent beaucoup sur ce que c’est d’être Juif. Et comme ils le disent si bien : mettez 2 juifs dans une pièce pour débattre et vous aurez 3 avis.

    Même si il a quitté sa mère des années auparavant, Vicente souffre de ne pouvoir rien faire pour l’aider. Une séparation difficile, d’autant plus qu’il n’était pas certain de vouloir qu’elle l’accompagne dans son exil.

    Vicente découvre à travers la presse le sort réservé aux juifs d’Europe, et se sent impuissant. Un roman intéressant pour les questions qu’il pose.

    L’image que je retiendrai :
    Celle de Vicente espérant que sa mère ai pu emmener dans son dernier voyage son châle rose.
    https://alexmotamots.fr/le-ghetto-interieur-santiago-h-amigorena/


  • Conseillé par (Libraire)
    23 septembre 2019

    Vaincre le silence

    Ce texte est une pépite ! Le ghetto intérieur, c'est surtout la culpabilité qui va pousser Vicente au silence. Parce que l'horreur nazie n'a pas de mots. Parce que parfois on a l'impression que si on ne dit pas les choses, elles n'existent pas. C'est un roman délicat et émouvant sur la famille, l'exil et l'identité. Une lecture émouvante, indispensable.


  • Conseillé par (Libraire)
    12 juin 2019

    La culpabilité, ce n'est pas forcément avoir appuyé sur la gâchette, ça peut aussi être ne rien avoir fait. Ne pas avoir dit assez fort. Ne pas avoir été là. ou même ne pas avoir été né.
    Ce roman splendide dit tout de la douleur des survivants, de ceux qui sont partis à temps, de ceux qui ont regardé de loin sans rien pouvoir faire.
    Un bijou.